Sortie longue : pas que pour le marathon !

Sortie longue : pas que pour le marathon !

Ah la célèbre sortie longue que les marathoniens font religieusement tous les dimanches… ils ont raison me direz-vous car pour courir 42km il faut être capable d’enchaîner les kilomètres sans broncher ! Mais est-ce que cette sortie longue n’est pas plus complexe qu’il n’y paraît au premier abord ? Courir longtemps ok, mais si je vous disais que la règle du « plus c’est long plus c’est bon » n’est pas forcément vraie ? Ou encore que tous les coureurs auraient intérêt à intégrer une sortie longue par semaine dans leur programme ? Même les coureurs de 5 ou 10km ! Elle aura un format plus court que celle des marathoniens évidemment mais les bénéfices sont tout de même là.

Les bases de la sortie longue

La sortie longue correspond simplement au fait d’avoir une sortie au volume plus important que ce qu’on a l’habitude de faire dans la semaine. Il n’y a donc pas de durée ou de kilométrage à respecter pour valider qu’on fait une sortie longue ou pas. Elle pourra durer simplement 1h à 1h15 pour les coureurs qui ont un volume d’entraînement modeste. Le débutant en course à pied devrait d’ailleurs attendre d’avoir stabilisé les bases avant d’en inclure dans sa pratique pour éviter les risques. Et quand on prépare un 5km ou 10 km, pas besoin de faire une séance longue trop fatigante, ce sont des distances courtes qui ne nécessitent pas un travail très long.

D’ailleurs quel que soit le coureur, faire une sortie longue par semaine ne veut pas dire faire des sorties très longues chaque semaine. En dehors des périodes de préparation spécifique, a-t-on besoin d’aller au-delà d’1h30 ? Personnellement je réserve les sorties > 1h30 pour mes plans d’entraînement spécifiques. Pour le semi-marathon, je monte progressivement pendant ma préparation de 1h15 à 2h. Sur marathon, je monte progressivement aussi en partant de 1h30 pour finir avec trois sorties de 2h00, 2h15 et 2h30 pendant le cycle le plus intense du plan. Le reste de l’année, j’essaye de garder régulièrement des sorties de 1h15 et parfois d’1h30 mais pas plus. Pour faire plus de volume j’enchaîne par contre parfois 2 sports en entraînement croisé comme j’en parle plus loin.

En quoi la sortie longue fait progresser ?

Une chose est sûre, la sortie longue est une séance clé pour progresser. Sur la base, c’est une séance d’endurance fondamentale comme les autres. Les bénéfices sont donc les mêmes : amélioration générale du système cardiovasculaire, de l’utilisation de l’oxygène par les muscles en développant les réseaux de distribution… Bref, le développement de l’endurance de base.

Mais le but de la sortie longue est surtout de s’entraîner à devenir de plus en plus économique dans sa manière de courir. En effet, plus on court longtemps, plus avec la fatigue, notre foulée va se dégrader. En faisant des sorties longues régulièrement, on renforce notre capacité à courir efficacement de plus en plus longtemps. D’où le fait que cette séance soit fondamentale pour les marathoniens. Le plus longtemps on est capable de garder de l’efficacité dans sa foulée, le moins d’énergie on aura besoin pour avancer… et le plus tard on rencontrera le fameux “mur du marathon”. Attention tout de même, la sortie longue peut être un type d’entraînement fatigant. Comme toujours il faut jouer avec sa planification d’entraînement de manière intelligente.

Plus c’est long plus c’est bon ?

J’en ai parlé un peu plus haut, mais je ne suis pas particulièrement adepte des sorties très longues. Pour un plan marathon, c’est 3 sorties à 2h et plus. Plusieurs d’entre-vous m’avaient d’ailleurs (gentiment) indiqué que mon marathon serait compliqué à cause de ça. Si j’ai réussi à prouver le contraire avec mes 2h55 à Paris, cela montre pour moi que la durée de la sortie longue n’est pas la clé de la réussite sur marathon. J’en parle dans mon guide pratique de l’entraînement marathon mais pour moi, la clé c’est l’allure spécifique. Mes sorties longues ne sont pas très longues mais elles incluent une bonne dose d’allure marathon. Le fait de réaliser ces fractions à allure marathon dans la deuxième moitié de la sortie longue, en ayant déjà brûlé de l’énergie permet d’être (un peu) plus proche des conditions de course et donc de travailler plus efficacement.

Faire des sorties trop longues (> 2h30) est à mon avis inutile et peut même être contre-productif avec la fatigue qu’elles génèrent. Évidemment cette règle n’est pas générale. Elle ne s’applique par exemple pas aux coureurs de très longues distances / d’ultra. Lorsque l’on prépare des ultras, on court à une allure très lente qui permet d’encaisser les durées plus élevées. Mais pour les distances jusqu’au marathon, je reste convaincu que 2h30 est un maximum (quel que soit le temp qu’on vise) et que le volume d’entraînement doit se répartir sur la semaine plutôt que d’en faire beaucoup sur une sortie !

La sortie longue par le coach d’Hassan Chahdi

Ma vision sur le sujet a été confortée cette semaine à la lecture d’un papier écrit par Jean-Claude Volmer. Il est l’entraîneur d’Hassan Chahdi, 2h10 au marathon de Paris, et ne fait pas de grosses sorties longues pour préparer un marathon… Preuve qu’on pourrait s’en passer ? Certes un marathon en 2h10 et un marathon en 3, 4 ou 5h, ce sont des efforts totalement différents. Mais la réflexion mérite d’être faite.

Si je devais retenir une règle très intéressante de ce papier, c’est que la “sortie la plus longue ne devrait pas dépasser 25 % à 30 % de votre volume kilométrique hebdomadaire global“. Comme je pouvais l’imaginer, pour quelqu’un qui a un volume d’entraînement de 80 à 100km / semaine, faire une sortie longue de 30km ne semble pas poser problème. Par contre, pour quelqu’un qui court 30 à 50km / semaine, ce type de sortie génèrerait plus de problème que de bénéfices… C’est son avis… D’accord, pas d’accord ?…

Une chose est sûre, le volume d’entraînement global est pour moi le plus important pour pouvoir être efficace sur marathon. Faire une sortie longue par semaine c’est bien. Mais avoir un volume global conséquent prépare le corps à enchaîner les kilomètres de manière plus douce que de tout miser sur une grosse sortie longue le dimanche.

À quelle fréquence faire des sorties longues ?

Idéalement, lorsqu’on respecte la règle de ne pas faire de sorties trop longues… il n’y a aucune raison de ne pas en faire toute les semaines. Hors semaine de récupération, de coupure ou de reprise, faire des sorties d’1h15 chaque fin de semaine me semble être vraiment intéressant. Cela permet d’engranger les bénéfices déjà évoqués plus haut sur une base régulière. Et pour ceux qui font des semi-marathons ou des marathons, ça permet d’attaquer les préparations sur « une base » connue par le corps.

À quelle allure courir sa sortie longue ?

De ce côté, c’est simple, la sortie longue (hors variantes évoquées plus bas) se court en endurance fondamentale. Par contre, la sortie longue est une séance d’entraînement à part entière. Ce n’est pas un footing de récupération non plus. L’allure idéale d’une sortie longue est donc au maximum de son endurance fondamentale. C’est ce que j’appelle footing max dans mon article sur les différentes allures de footing. En courant autour de ces 75%FCM, on est sur un effort facile à encaisser. Mais on maximise aussi les bénéfices de la sortie longue.

Les variantes de sortie longue

Je l’ai dit, lors de mes plans d’entraînement, je profite de la sortie longue pour intégrer mon allure marathon en deuxième moitié de séance. Mais la sortie longue peut aussi prendre d’autres formes. Vous pouvez la courir à la Paul Tergat. L’ancienne star du cross-country, de la piste, puis du marathon, avait pour habitude de terminer sa sortie longue par de l’allure 10km à semi-marathon (un peu au-dessus du seuil anaérobie donc) pendant 1 à 2 km. Je l’ai déjà testé en préparation semi-marathon… C’est intense, on brûle ses dernières cartouches, mieux vaut être proche de la maison quand on finit ça car l’hypoglycémie n’est pas loin !

Une autre variante que j’utilise beaucoup est l’entraînement croisé en sortie longue. Selon l’importance de la sortie longue dans ce que l’on prépare, faire 1 à 2h de vélo pour commencer (sans forcer mais en moulinant tout de même activement pour que l’effort commence à puiser de l’énergie) et enchaîner sur 1h à 1h30 de course à pied. C’est vraiment efficace et ça apprend à bien gérer son ravitaillement pour un marathonien !

La nutrition d’une sortie longue

Je vous ai parlé ici de la stratégie globale de nutrition pour le marathon. La sortie longue est évidemment au coeur de cette stratégie. C’est elle qui permet de tester tout ce qu’on fera le jour J ! Commencez par un petit déjeuner classique = que vous avez l’habitude de manger. Quelque chose qui passe bien et idéalement que vous avez déjà testé avant de courir. Il faut déjeuner au moins 2h avant sa sortie longue. L’idéal serait 3h mais… ça fait souvent se lever tôt ou courir tard. Plus vous mangez proche de votre sortie, plus vous devrez manger léger pour ne pas vous alourdir l’estomac. Adaptez ce que vous mangez pendant la sortie longue.

Il est important d’avoir de quoi se ravitailler pendant la sortie longue > 1h30 pour éviter la fringale. Toujours avoir à boire et à manger avec soi (sucres rapides type gel, pâtes de fruit ou fruits secs) que l’on prendra par petite prise. À vous d’adapter ensuite à vos besoins. Boire une gorgée toute les 15’ d’eau (légèrement salée pour compenser les pertes via la transpiration, le goût peut être masqué avec du jus de citron) et manger toutes les 45’ serait idéal. Et si en préparation marathon, je me limite au strict minimum pendant mes sorties longues pour travailler la filière lipidique (l’utilisation des graisses comme énergie plutôt que les sucres), il faut faire attention à ne pas tomber dans l’hypoglycémie non plus. Ayez toujours un gel ou des fruits secs en secours avec vous pour pallier aux imprévus !

Utilisée intelligemment la sortie longue est votre alliée !

Au final, ce qu’il faut retenir, c’est que la sortie longue, bien intégrée dans un plan d’entraînement équilibré, aura des effets hyper positifs sur votre endurance. Pour moi répéter des sorties longues de 1h15 à 1h30 max tout au long de l’année (hors période de reprise !) est quelque chose de très efficace. Garder les sorties encore plus longues (jusqu’à 2h30) pour les préparations spécifiques aux courses permet de ne pas fatiguer à cause de leur répétition.

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